Initiation au biomimétisme

3977

Initiation au biomimétisme

Depuis l’apparition de la vie sur Terre, il y a 3,85 milliards d’années, notre planète n’a pas attendu l’homo-sapiens pour créer le premier laboratoire de recherche et développement.

Nous rappelait déjà Léonard de Vinci, qui a théorisé le bio-inspiration avant l’heure en ouvrant la voie au biomimétisme. Mais encore ? Au sens littéral du terme, le biomimétisme, du grec bios, la vie et mimesis, imitation désigne la démarche immémoriale de l’espèce humaine qui puise son inspiration en décryptant la nature afin d’innover, d’améliorer ses technologies, sa condition, son organisation…

« Le biomimétisme détaille trois niveaux d’inspiration, d’exigence croissante en termes de durabilité: les formes adoptées par les êtres vivants ; les matériaux et les processus de « fabrication » opérant chez les êtres vivants ; les interactions que les espèces développent entre elles et le fonctionnement global des écosystèmes naturels » : source Biomimicry Europe.

C’est à la scientifique et écrivaine américaine Janine Benyus que nous devons cette nouvelle discipline. Son livre fondateur Biomicry – Innovation Inspired by Nature pose les bases du biomimétisme en 1997. Il marque sa naissance et se singularise en pointant l’importance accordée à la dimension de durabilité. Janine Benyus écrit : « […] contrairement à la révolution industrielle, la révolution biomimétique ouvre une ère qui ne repose pas uniquement sur ce que nous pouvons prendre dans la nature mais sur les possibilités offertes par la nature pour modifier notre façon de cultiver, de fabriquer des matériaux, de produire de l’énergie, de nous soigner, de stocker de l’information et de gérer nos entreprises […]. »

Aux racines de l’histoire, une légende chinoise fait remonter la découverte de la soie au XXVIIème siècle avant Jésus- Christ, l’impératrice Leizi fit tomber par accident dans sa tasse de thé une larve provenant des branches d’un mûrier. Fine observatrice, elle repéra les multiples qualités du fil produit par l’intruse. Les plus anciens fragments de soie découverts ont été tissés il y a quatre mille cinq cents ans. Le ver à soie demeura un secret jalousement gardé par la Chine.

Hilaire de Chardonnet, chimiste et ingénieur, associé aux travaux de Louis Pasteur, chercha à imiter en laboratoire le travail de la larve et fabriqua une fibre, la soie artificielle présentant les qualités de la soie, à partir de cellulose et de collodion. Saviez-vous que l’architecture s’inspire du génie de la vie ? Que la coquille Saint-Jacques est à l’origine de la tôle ondulée ? Que la Tour Eiffel est basée sur l’observation d’une coupe sagittale du fémur ? Que le mouvement des engins chenilles est issu des chenilles ? Que les yeux antireflets des mouches ont permis la création de panneaux voltaïques ? Que l’architecte Antoine Gaudi s’est inspiré des arbres pour bâtir les colonnes inclinées et arborescentes ?

Les exemples de réalisations sont colossales. En 2014, est fondé le Ceebios, Centre européen d’excellence en biomimétisme. Le 11 septembre dernier, se tenait Biomin’expo à l’Hotel de Ville de Paris, chambre d’écho de la communauté biomimétique française composée d’entreprises, d’ingénieurs, de chercheurs, d’architectes… « Comment améliorer nos réponses techniques aux problèmes actuels par des solutions inspirées du vivant ? Car le vivant innove en permanence, pour tous, et il le fait avec une grande parcimonie d’énergie, sans créer de nouvelles substances qu’il ne sait dégrader, comptant toujours un acheteur pour ses déchets. Il innove en optimisant et c’est pourquoi nous devons changer nos méthodes actuelles pour nous adapter. Aucune espèce ne s’est jamais adaptée sans changer ! »*

  • Préface de Gilles Boeuf
    du livre de Michael Pawlin,
    Biomimétisme & Architecture.
    Gilles Boeuf, Professeur à
    Sorbonne Université, Président
    du conseil scientifique de
    l’Agence française pour la
    biodiversité, Ancien président
    du Muséum national d’Histoire
    naturelle, Professeur invité
    au Collège de France, Ancien
    conseiller scientifique au
    ministère de l’Environnement,
    de l’énergie et de la mer.