Philippe Rham, l’architecte du climat

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PHILIPPE RHAM, FLEURON DE L’ARCHITECTURE BIOCLIMATIQUE INTÈGRE L’EAU, LA CIRCULATION DE L’AIR, LE SOLEIL, LES VARIATIONS DE TEMPÉRATURE DANS TOUS SES PROJETS. LE PARC QU’IL A IMAGINÉ POUR LA VILLE DE TAICHUNG, À TAÏWAN, LE PLACE ENCORE UNE FOIS À L’AVANT-GARDE DE CETTE ARCHITECTURE DU CLIMAT.

SÉQUENCE INTERVIEW
Philippe Rham, inventeur de l’architecture météorologique, chercheur, enseignant à l’École Polytechnique de Lausanne, Princeton, Colombia, Harvard, fondateur de son agence éponyme.

VIRGINIE SPEIGHT. Comment l’eau et le climat ont façonné la ville et les bâtiments ?

PHILIPPE RHAM. La présence de l’eau à un niveau urbain s’avère évidemment nécessaire pour l’établissement des villes. On a besoin d’eau potable, de fontaines. Toutes les villes, toutes les implantations humaines sont à la base à proximité d’une source d’eau. On sait que les premières villes en Mésopotamie étaient établies à côté d’une rivière – le Tigre et l’Euphrate. Les murailles avaient la mission aussi d’être des digues contre les inondations.

V.S. Et au niveau de l’architecture ?

P.R. Ensuite, au niveau de l’architecture. Le premier point à souligner est la question de la pluie. De fait, une des premières raisons de l’architecture est la construction du toit pour protéger à la fois du soleil et de la pluie. La forme des toits des bâtiments en triangle est liée à la question d’étanchéité du matériau. Le plus souvent, les toits étaient faits en chaume donc pas complètement étanche. Il fallait une pente assez forte pour écouler l’eau. Il ne fallait pas que l’eau pénètre le matériau et rentre dans les maisons. La forme des toitures relève de la gestion de l’eau dans l’histoire. L’eau est encore présente dans les pays méditerranéens comme source de rafraîchissement. On sait que quand l’eau s’évapore de la forme liquide à la forme gazeuse, cela fait baisser la température de l’air et par là même rafraîchit. C’est pourquoi, dans les villas romaines, la villa Tivoli par exemple, dans les aménagements de la Renaissance baroque, on y trouve toujours ces fontaines sur les places. Sur la place Saint-Pierre à Rome de Michel-Ange, on observe deux énormes machines pour refroidir l’air tout autour. Même chose au Maroc, dans les riads, où il y a toujours une fontaine qui est là pour rafraîchir. Si on résume, l’eau comme élément intervient à ces trois niveaux : au niveau urbain pour l’implantation des villes, au niveau de l’architecture pour la toiture, et au niveau des aménagements pour le rafraîchissement.

V.S. À votre échelle, comment abordez-vous ces questions ?

(Suite de l’interview dans le magazine N°14)