L’ÉCOLE NELSON MANDELA, VERSION 3D BOIS SOUS LE SOLEIL OCCITAN

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ÉTUDE DE CAS

Pour la ville de Juvignac, le désir de bâtiment durable et un calendrier serré ont dicté des choix stratégiques : le marché de conception-réalisation et la construction modulaire en bois local. Focus sur un projet confié au groupement montpelliérain d’entreprises Gecco, emmené par Selvea.

. Une vraie coopération s’est instaurée entre l’architecte Stéphane Goasmat et le constructeur pour concevoir une école de 16 classes et 2 cantines, déplaçable selon les besoins de la carte scolaire ». Images : Stéphane Goasmat – Atelier GA .

« Nous souhaitions innover et faire simple, mettre en avant les valeurs humaines et environnementales pour ce projet de groupe scolaire implanté dans le nouveau quartier Constellation. La procédure du marché public de conception-réalisation, réglementairement restreinte, était, dans notre cas, vraiment pertinente et même pédagogique », résume Jean-Luc Savy, Maire de cette commune résidentielle de l’agglomération montpelliéraine confrontée à une démographie galopante et une pénurie de salles de classe. Près de 1 700 logements construits, soit 3 000 habitants supplémentaires, et un nombre d’élèves en hausse de 45 % en quelques années exigeait en effet une réponse rapide et efficiente… Mais pas seulement.

Modifiable
« Au-delà de l’urgence du chantier, il fallait prévoir l’avenir de cet équipement public. Paradoxalement, les locaux d’une école sont, en fait, sous-utilisés si on lisse la moyenne des heures de classe sur l’année entière. Nous voulions donc des espaces modifiables et même transportables. Dans un premier temps, la moitié de l’espace sera adaptable afin d’être partagé : centre aéré durant les vacances, salles de réunion pour les associations hors calendrier scolaire, etc. A terme, des salles de classe peuvent être entièrement déplacées pour s’ajuster à notre carte scolaire si besoin », explique l’édile.

. Images : Stéphane Goasmat – Atelier GA .

Pas de droit à l’erreur
La procédure de conception-réalisation permet quant-à-elle à un groupement d’entreprises mandataire de « prendre la main » sur un dossier, d’en maîtriser tous les enjeux afin d’apporter les réponses adéquates en toute connaissance de cause. Revers de la médaille, elle n’autorise pas de droit à l’erreur de calcul : « la moindre omission ou correction reste à la charge de l’entreprise », rappelle Sylvain Fourel, patron de Selvea. Il s’agissait aussi de conserver une vraie coopération avec le cabinet d’architecte, en l’occurrence l’Atelier GA de Stéphane Goasmat.

Sylvain Fourel, ingénieur en génie productique INSA Lyon et diplôme MBA : « Son objectif : passer de l’artisanat à l’échelle industrielle »

Bio-sourcé
Autres points-clés d’un projet de groupe scolaire sous le climat méditerranéen revendiquant plusieurs labels du bâtiment durable : des qualités acoustiques et thermiques irréprochables, qui ont donc nécessité des études très poussées en amont (au total, les études techniques représentent 7 % du montant des travaux). Ce qui a permis d’optimiser la préfabrication de 157 modules en ossature bois, à typologie diversifiée. En premier lieu, les salles de classe assemblées sur la base de trois modules de 8 x 3 mètres, juxtaposés, composés de poteaux en bois massif (pin Douglas), de cloisons en panneaux bois et de planchers ou plafonds de type OSB ou lamibois, garni d’isolants bio-sourcés (fibre de bois, ouate de cellulose).

Au-delà des enjeux techniques, il était aussi question d’éthique et d’esthétique pour insérer l’équipement public dans un urbanisme à rééquilibrer.

Filière régionale
Semi-équipés, les modules ont été produits dans l’atelier de Selvea, justement proche du chantier de Juvignac. L’atout supplémentaire du dossier était, en effet, de privilégier un circuit court, utilisant majoritairement du bois de la filière régionale (issu de la forêt cévenole voisine) et rassemblant quelques 23 fournisseurs ou intervenants des différents corps d’état, sous la houlette de la coopérative Gecco. Quant à la société Selvea, elle exprime ici sa vocation de pilotage d’opération, de production en atelier et d’installation sur chantier, forgée sur huit années d’expérience au sein du réseau Gecco. Disposant d’un outil industriel (3.600 m2 d’atelier) et de troupes aguerries (30 personnes dont 3 pour les études techniques en interne), Selvea a pu conduire et coordonner les 4 lots de travaux en cotraitance. Exemples de contraintes préalables : cinq mois pour le terrassement des lieux formés essentiellement de remblais, exigeant des pieux de fondation en béton de 8 mètres de profondeur.

L’assemblage des éléments en atelier ne comprend pas toutes les finitions mais fait intervenir plusieurs métiers au sein de l’entreprise Selvea.

Pergolas
Côté construction, l’unité-type de la salle de classe est presque carrée, dans un plan de l’école lui aussi organisé en carré et de plain-pied. Les espaces de circulation sont relégués en périphérie et le contreventement du bâti est assuré par une paroi pleine intérieure. Côté cour intérieure, les façades peuvent donc être entièrement vitrées et bénéficier d’un éclairage naturel efficient tout en conservant un confort d’usage sans climatisation ni craindre un effet de surchauffe. Tout cela grâce à un vitrage à facteur solaire (filtres au coefficient de transmission thermique Uw 1,4). De modestes pergolas ou de courts préaux latéraux suffisent par ailleurs à protéger des excès d’ensoleillement.

Le parti-pris d’un bâti organisé en carré autour de la cour de récréation et du module bois permet de jouer la carte du bio-climatisme.

Sans résonnance
Une Simulation Thermique Dynamique (STD) très poussée valide aussi l’installation d’une simple ventilation et d’un chauffage par radiateurs à eau (équipements en PAC air-eau). « Les estimations théoriques situaient les moments d’inconfort à seulement 20 heures par an, admettant l’inutilité d’une fonction rafraichissante ou d’un plancher rayonnant », résume Sylvain Fourel, pdg de Selvea. Qualité rime donc ici avec sobriété. Pour sa part, le diagnostic acoustique confirme les atouts des planchers en bois (dalles CTBH 22 mm en rupture de sol) qui offrent un confort phonique estimé à 18 db au sol, sans résonnance, plutôt satisfaisant au quotidien pour les élèves et les enseignants !

Philippe Bardiau

Postulat du concours de conception-réalisation : privilégier la structure modulaire, le potentiel d’évolutivité future de l’aménagement, la rapidité et la faible nuisance du chantier, l’exemplarité environnementale et l’origine locale des matériaux, le confort d’usage. L’ossature bois s’est alors imposée très majoritairement parmi les cinq dossiers candidats retenus. Le matériau bois n’est pourtant pas systématiquement revendiqué côté design. Les plafonds apparents en caissons Kerto ou poutres lamellé-collé des salles communes ou des claustras sur plusieurs façades vont ainsi de pair avec des menuiseries de baies vitrées revêtues d’aluminium ou des supports en acier pour les avancées de toit.

Si le moins-disant budgétaire n’était pas le premier critère, le prix au mètre carré de cet équipement scolaire reste raisonnable voire concurrentiel comparé au bâti conventionnel, soit 1.680 € HT /m2. Georges Dafonseca, directeur de l’aménagement de la ville, constate après-coup : « Il faudrait sans doute élargir le code des marchés publics pour les conditions d’attribution à la conception-réalisation, ainsi que les possibilités de préconisations des PLU. » Tout cela afin de convaincre les élus locaux du bien-fondé de l’innovation, et d’encourager les entreprises à assurer la maîtrise d’œuvre, sans pour autant le faire au détriment des architectes. Le modulaire incite notamment les constructeurs à optimiser leurs méthodes et leurs coûts, donc leur compétitivité. »

A PROPOS DE

Fiche Chantier
Mandataires : Gecco (SCA) & Selvea (SAS)
Architecte : Stéphane Goasmat, L’atelier GA (30),  spécialiste des équipements scolaires
Montant des travaux : 6,4 M € HT, dont 434 000 € d’études techniques
Surface du groupe scolaire Nelson Mandela : 3 800 m2, soit 16 salles de classe partagées entre 450 écoliers, élémentaires et maternelles.
Equipe de construction (34) : Ferrini (BTP), Mobbe (charpentes), SBC (murs bois), Altea Bois (BE), SAI BE (réseaux).

Calendrier 
Mars 2016 : Début des terrassements
Octobre 2016 : Pose du premier module bois
Rentrée 2017 : Livraison de l’école

Fiche d’identité
Société Selvea : www.selvea.com, basée à Vendargues (34) :
2,6 M€ de C.A en 2016 (le double, prévu pour l’exercice en cours)
Références récentes : extension de services administratifs pour le centre hospitalier de Béziers (850 m2)
Projets en cours : crèche de Meudon-la-Forêt.